Visite à Mghila, le 28/07/2009
Douar Lahouaza
D'El Menzel, nous nous dirigeons vers Ahermoumou.
Nous traversons Oulad Mkoudou, puis Bouderham juste après l'embranchement, à notre droite, vers l'Aïn Sebou.
Arrivés devant la première ferme Mange, nous quittons la route et entrons, à droite, sur la piste menant à Mghila.
Nous roulons sur un vaste plateau, territoire des Aït Boukris.
Bientôt, à gauche, sur une petite éminence, se dressent les bâtiments désaffectés de la grande ferme Mange.
Puis c'est la grande descente vers Mghila, d'où on domine une petite vallée à laquelle les pluies de l'hiver 2008/2009 ont redonné un peu de sa verdoyance d'autrefois.
Nous laissons la voiture au surplomb du village, au-dessus de la zone des cascades et faisons un tour à pied à travers champs.
Sur un versant des hauteurs qui nous entourent se voient nettement les conséquences de près de 30 années de sécheresse qui ont provoqué un important exode rural: des habitations abandonnées tombent lentement en ruines:
Nous passons sous le marabout de Sidi Mohamed Ben Touami.
Les panoramas sont impressionnants.
Nous admirons, au passage, les cascades abondamment filmées par Sandawi.
Puis nous écoutons les explications détaillées de notre ami concernant le système de répartition de l'eau entre les cultivateurs. Ce système, très ingénieux et très équitable, fondé sur le rythme des 5 prières musulmanes, a été mis au point de façon très minutieuse par un fquieh de Mghila au début du 19e siècle.
Nous nous rafraîchissons et nous nous désaltérons à la fontaine de l'Aïn Baadis, qui jaillissait autrefois un peu plus haut.
Au centre du douar, dans la boutique où notre ami nous a invités à boire une limonade glacée, nous sommes rejoints par le frère et un cousin d'un des membres de notre forum.
Le frère de notre ami lointain nous propose de renforcer notre groupe de promeneurs.
Nous voici devant un moulin à olives.
Je m'arrête plus loin devant une habitation ancienne, inhabitée aujourd'hui, d'une architecture particulière, sur deux niveaux, dont je trouve la conception particulièrement intéressante..
En chemin, je cueille des feuilles de timersate et de minnta, dont je hume avec volupté les parfums forts. Notre ami déracine une touffe de minnta que je replanterai à Aïn Dqouq.
Je tombe sur des touffes de tirghela (appelée magramane en berbère, me dit-on), plante réputée pour être efficace contre l'hépatite C.
Sur les parois de la falaise je découvre étonné des câpriers, dont on me dit que les fruits étaient, à une époque récente, récoltés pour être vendus à une société étrangère.
Notre ami nous montre, dans un ruisseau, une abondante prairie de cresson naturel ( tijouamane) dont, pantalons retroussés, il descend me cueillir une botte.
Il me conduit ensuite devant un buisson de ganndoul, dont il m'explique l'usage qu'on en faisait autrefois dans les fours à chaux, car la combustion de cet épineux donne une température avoisinant les mille degrés.
Nous rencontrons au milieu des champs un personnage fort sympathique, qui se présente comme l'ancien chauffeur de Monsieur Mange, et qui est à la fois ému et intrigué par ma présence en ces lieux et tout content de voir quelqu'un à qui il peut parler en français. On lui explique le pourquoi et le comment de ma visite, et mes liens familiaux avec les Beni Yazgha.
Voilà quelqu'un avec qui j'aimerais passer un plus long moment un de ces jours. Il doit avoir beaucoup à me raconter.
Revenus sur la piste, nous descendons sur le côté gauche, vers un ensemble de 4 sources. Nous visitons chacune d'elles, et leur rendons hommage pour leur bienfaisante prodigalité.
Aïn Kebir
Aïn El Hakka
Aïn Talba
Aïn Soultane
En chemin, notre ami nous démontre, joignant le geste à la parole, comment, dans sa jeunesse, il déterrait, d'une brusque arrachée, une touffe de doum pour en grignoter la racine.
Je me retrouve avec une belle racine, que je croque avec gourmandise: c'est bon, cela a un léger goût de noisette, et ressemble au cœur de palmiste que nous mangeons à La Réunion.
Nous avons beaucoup marché. Le soleil décline.
Nous rejoignons la voiture et faisons nos adieux aux Mghilis (dont certains, que j'ai reconnus, s'avèrent être de ma parenté) qui nous ont accompagnés dans cette amicale randonnée. Nous prenons l'engagement de nous revoir à El Menzel.
Au retour, nous nous arrêtons au milieu de l'ancienne exploitation Mange, et nous allons voir de près le puits qu'a fait creuser l'ancien maître des lieux.
Le puits en lui-même n'est pas très profond, mais il débouche sur une cavité dont on me dit qu'elle atteint 500 mètres de profondeur.
On rapporte que lors des travaux, alors que 3 puisatiers étaient à l'œuvre au fond, l'un d'entre eux a appelé M. Mange et lui a montré un objet jaune, très brillant, qu'il venait de découvrir. M. Mange lui aurait aussitôt demandé de remonter, aurait saisi la chose et aurait déclaré:
"Voilà ce que je cherchais. Maintenant, vous pouvez arrêter de creuser et rentrer chez vous".
Ensuite les 3 ouvriers auraient été largement récompensés, auraient reçu en prime un mouton chacun, mais nul n'aurait jamais revu l'objet étincelant dont on ignore la nature exacte.
Des années plus tard, le site aurait été exploré par des spéléologues...
On n'en sait pas plus!
Froissart, le 29/07/2009