• L'Economiste

     
    Ahermoumou ou le délit d’adresse
     
    · Une localité gangrenée par le chômage et la pauvreté

    · Une région toujours punie après le putsch de 1971


    Ahermoumou… traduisez: petit lion. Pour ironiser, la population locale appelle le village Ahreb mennou (fuis-le), tellement la vie y est dure et crainte. A première vue, la bourgade s’apparente à un havre de paix. Rebaptisé Ribat Al Kheir (tdlr: campement de paix ou du bien) au lendemain du putsch de 1971, le village surplombe un panorama féerique, une vaste vallée au-delà de laquelle se dresse un mont impressionnant, le Bouiblane (près de 3.200 mètres d’altitude).
    Au lendemain de la rentrée scolaire, une ambiance bon enfant règne ce lundi dans le souk hebdomadaire d’Ahermoumou. Les cafés sont pleins à craquer de jeunes qui végètent dans l’oisiveté forcée et le chômage. Un seul verre de café est souvent partagé par deux à trois personnes. D’aucuns roulent discrètement des joints en scrutant tout sur leur passage. La veulerie des jeunes et la proximité de Ketama et Taounate accentuent la quête de paradis artificiels.
    A l’entrée du souk, des jeunes s’affairent tant bien que mal devant des étals de cahiers et cartables. Ils vendent aussi de vieux manuels scolaires et des fournitures bon marché, mais se plaignent de la morosité économique du village et du faible pouvoir d’achat de ses habitants. De leur avis, avec la neige sèche et la grêle, l’année a été difficile et les récoltes très médiocres. Tout autour d’eux, de nombreux vendeurs et clients en treillis et casquette militaire type KF, visage marqué par la rudesse du climat. Le village est un centre de ralliement de plusieurs douars qui vivent dans un rayon de 70 km; c’est aussi un réservoir inépuisable de recrutements pour l’armée de terre. Les hommes de troupe et les sous-officiers originaires d’Ahermoumou sont légion et réputés être des plus coriaces. Ce qui explique en partie l’omniprésence d’hommes en uniforme dans cette localité. Pour l’anecdote, une fois une patrouille de la police militaire a fait une descente au souk pour réquisitionner les uniformes portés par des civils. En moins d’une heure, le village s’est vidé de ses hommes, car la quasi-totalité porte le treillis, le chandail, la djellaba, si ce n’est pas la casquette ou les brodequins. C’est aussi parce que la région est pauvre et connaît des hivers rudes et secs, précise un ancien militaire, qui ajoute que chaque famille a au moins un parent dans l’armée. Si ce n’est pas le fils ou le frère, c’est le cousin, explique-t-il.
    Mis à part cet aspect militaire, la population vit dans l’isolement et la précarité. Un repli attribué sans doute au passé agité du village.
    Et ça ne date pas d’hier. Cela fait exactement 34 ans que cette bourgade est marginalisée, répète-t-on à qui veut l’entendre. “La région est sous embargo économique. Elle paie cher le tribut d’un putsch auquel elle n’avait jamais participé”, lâche un jeune étudiant en psychologie. Aux yeux d’un bon nombre de Marocains, nous continuons à être perçus comme étant une population rebelle dans une zone suspecte, renchérit-il. Le seul tort d’Ahermoumou, de l’avis de ses habitants, est qu’il ait abrité l’Ecole militaire des sous-officiers, autrefois une fierté nationale. Centre à partir duquel ont été préparés les événements de Skhirat en 1971 sous les ordres du lieutenant-colonel Ababou.
    Pour un chef de famille, “c’est insensé, le village n’a pas à payer les pots cassés. D’autant plus que la caserne abritait des militaires venus des quatre coins du pays”. Et d’ajouter, la région est un bouc émissaire, le sort du village rejoint parfaitement l’adage marocain qui dit: “Le minaret est tombé, pendez donc le barbier”. Dans ce patelin, l’on ne peut contester une injustice. “Eu égard au passé récent du village, toute revendication quelle qu’elle soit est perçue comme un acte de rébellion, une dissidence”, estime un quadragénaire licencié en littérature arabe, actuellement au chômage. A en croire les jeunes, les sit-in sont inutiles dans ce patelin et les partis politiques ne viennent que rarement au village. Et quand ils le font, c’est à la veille ou au lendemain des élections. La dernière visite en date a été effectuée par des députés. “Ils nous ont promis la levée du blocus sur la région, mais depuis rien n’a été entrepris et on ne les a plus revus”, ajoute cet étudiant en psychologie.
    Pour des diplômés chômeurs, dont la majorité est née au lendemain du putsch, ils se contentent de cours de renforcement ou se convertissent en manoeuvres dans les champs et le bâtiment pour subvenir à leurs besoins. Par ailleurs, le milieu associatif reste un vœu pieux. La plupart des associations n’arrivent pas à avoir le récépissé des autorités locales. Normal, rétorque un responsable communal, car si après enquête il s’avère que l’association défend des intérêts politiques, c’est le refus catégorique.
    Plus de 30 ans après les événements de Skhirat, la population nourrit l’espoir que soit tournée l’une des pages les plus sombres du Maroc du siècle dernier.


    Ahermoumou ou Ribat Al Kheir?


    Rebaptisé Ribat Al Kheir au lendemain du putsch de 1971, une appellation qui reste purement administrative puisque la population locale la refuse catégoriquement, cette localité du Moyen Atlas est située à quelque 72 kilomètres au sud-est de Fès et à 52 km de Sefrou, la capitale de la cerise. La nouvelle appellation n’existe vraiment que dans les registres, les papiers administratifs et la signalétique routière.
    A 1.126 mètres, elle surplombe un panorama féerique: une vaste vallée entourée de montagnes et de forêts de cèdre et de chêne, au-delà de laquelle se dresse un mont impressionnant, le Bouiblane (3.190 mètres d’altitude).
    Pour les autorités locales, le village est désormais répertorié en tant que ville. Ils reconnaissent, toutefois, qu’il n’en a pas les caractéristiques. Bizarrement, c’est la gendarmerie qui y assure la sécurité et non encore la Sûreté nationale. Selon le dernier recensement, la population de Ribat Al Kheir est estimée à 13.189 personnes en 2005. La région connaît l’un des taux démographiques les plus importants dans la région de Sefrou, soit 4,5%. Principales activités, l’élevage, l’agriculture (céréales, oliveraies, pommiers…) et dans une moindre mesure le commerce.

    Jihad Rizk


  • Commentaires

    1
    baba hajji taza
    Jeudi 10 Février 2011 à 08:14
    j ai enseigne a ahermoumou en -1969-70-71-
    a sidi yahya-a cote de la kiyada et a aghbal-j ai eu la chance de rencontrer monsieur HUIT-EX DIRECTEUR ET ml ABDAYMI aujourdh ui retraite
    je connais la famille baroudi allilouch et d'autre
    je veux renouer
    aidez moi merci
    voire photos sur
    GOOGLE---------------------taza hajji
    2
    PATRYCKFROISSART1 Profil de PATRYCKFROISSART1
    Jeudi 10 Février 2011 à 08:49
    Bonjour, Si Baba Hajji.

    Je vais transmettre votre message à la famille de Monsieur Huit et à celle de Si Driss Baroudi.

    En échange je vous rappelle que vous m'avez promis de me remettre en contact avec la famille de mon ami, mon frère Si Abdaïmi Ahmed, et de me donner les coordonnées de son fils Samir, professeur, je crois, à Taza.

    Merci.
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